lundi 19 novembre 2012

La Critique de Reflet de Shanghai sur Roliste TV


Achéron : Les Reflets de Shangaï - la critique par RolisteTV

Alors vous commencez à les connaître maintenant et ils sont toujours aussi actifs...
Promis, je ne les ai (presque) pas payés... 

dimanche 18 novembre 2012

Darkness there, nothing more...

Le corbeau, Gustave Doré



Parmi les difficultés qu'ont pu rencontrer certains joueurs durant leurs parties d'Achéron, la plus fréquente et la plus compréhensible est la complexité à faire cohabiter les deux visions (celle du Scepticisme et de la Foi) dans un même scénario, sans croiser des incohérences ou ruiner certaines conclusions logiques par des artifices défiant la compréhension.

Rassurez-vous, c'est la base du fantastique romantique et donc, en quelque sorte, le cœur d’Achéron. Cela fait partie des codes du genre et il convient de s'en servir comme d'un outil et non de le prendre comme une difficulté.

Oui, vos Gardiens ont bien vu la silhouette de la Comtesse glisser lentement dans une robe de gaze à la nuit tombée, mais après avoir fait le tour du manoir, elle se trouvera derrière eux, pour leur demander ce qui leur prend d'être encore éveillés à une heure aussi tardive, alors qu'elle n'aurait jamais pu se déplacer aussi vite...
Peut-être ses cheveux seront-ils encore un peu humides, peut-être qu'ils sont persuadé d'avoir fouillé le rez de chaussée et que pourtant, elle semble en venir et que jamais personne n'aurait eu le temps de se couvrir cette distance en si peu de temps.
C'est inquiétant et peu rationnel...Les Initiés jubilent...

Pourtant, à la fin de l'enquête, la solution sceptique gagne du terrain. La Comtesse est bien la meurtrière, ses actes dictés par la vengeance ont tous été scientifiquement expliqués lorsque l'arme des crimes à été retrouvée...
Alors pourquoi semblait-elle être dotées de pouvoirs extraordinaires ?
On ne sait pas et on ne saura jamais...
Ce doute est permis dans le fantastique car c'est lui qui dérange. C'est ce "oui mais..." qui empêchera les scientifiques acharnés de dormir correctement, c'est cette inconnue dans l'équation mathématique qui les a aidé à trouver la solution...

L'introduction d'un fantastique ou d'un mystère diffus ont fait le sel de nombreux livres policiers avec un certain succès, alors qu'ils mettent pourtant en scène des personnages terriblement cartésiens.
Si nous jetons un coup d'oeil à Sherlock Holmes, il se trouve parfois face à des révélations qu'il se garde bien de creuser, en général apportés par un "hasard malheureux", quant à son homologue chinois, le juge Ti, n'est-il pas parfois guidé dans son enquête par un ou deux spectres, qu'il préfère éluder dans ses conclusions ?
Il faut lire dans le Scepticisme une certaine dose de mauvaise foi et d'incapacité de reconnaître que l'esprit humain n'est pas, quelque soit son talent, en mesure de tout expliquer.
Et si eux ne le peuvent pas, personne ne le fera pour eux, cela fait partie de l'inquiétante conclusion de la majorité des nouvelles fantastiques : on ne sait pas comment la clé du caveau de Vera (Contes cruels, Viliers de l'Isle Adams) arrive dans la chambre du comte lorsque celui-ci parle seul en croyant sa femme défunte près de lui, pas plus que le meurtre de la Main d’écorché de Maupassant, n'est élucidé, alors que la terrible main momifiée demeure introuvable.
Il est tout a fait possible que le comte ait gardé la clé de la crypte dans sa chambre, tout comme il est possible que le propriétaire de la main ne soit mort d'apoplexie...Mais personne n'en aura jamais la certitude. Les bruits qu'entends le narrateur du Corbeau d'Edgar Poe sont possiblement tous réalisés par l'animal lui-même. Mais le doute subsiste.

Personne n'a vu le spectre de Véra, personne n'a vu la main d'écorché étrangler Pierre, pas plus qu'un témoin n'a pu entendre le corbeau dire distinctement "Nevermore" au narrateur de The Raven. Mais celui qui a la totalité de l'histoire en tête ne peut s'empêcher se songer à cette solution absurde que l'esprit refuse pourtant d'écarter tout à fait...sauf celui du Sceptique.

La meilleure solution est donc de faire arbitrairement agir le fantastique lorsque vous désirez qu'il intervienne, que vos joueurs le privilégie ou non, mais encore une fois, de manière diffuse et osera t-on dire "douteuse".
Le fantastique ne peut agir contre le Sceptique, mais peut le troubler, le mettre en échec, et c'est ce qu'il s'acharnera à faire, probablement appuyé par les Initiés.
Être face à un personnage Sceptique ne veut pas dire systématiquement étayer tous vos phénomènes par une explication rationnelle, et un Sceptique ne perdra pas sa Conviction seulement parce qu'il a été incapable d'expliquer un phénomène mystérieux.
Il se dira simplement qu'il n'a pas encore résolu cette énigme, mais qu'elle doit avoir une explication tangible. Cette recherche exclura d'office une "solution farfelue" ésotérique et conservera la conviction du Sceptique intacte.
Se réfugier dans l'indifférence ou la recherche frénétique d'une contre-vérité parfois tout aussi absurde sont des mécaniques de défenses mentales courantes pour des Personnages Sceptiques. ("je trouverais, je trouverais !!!") qui pourra d'ailleurs les conduire vers la folie plus rapidement qu'ils ne pensent.

La meilleure solution consiste donc toujours dans une formule simple : si des créatures sont apparues, c'est forcément de la faute d'un être humain qui devra être bien présent dans votre enquête.
Lorsque l'injustice ou la faute dont il est à l’origine aura été puni, fantastique comme rationnel désigneront le même coupable. Chacun pourra en tirer les conclusions qu'il veut, mais l'enquête sera bel et bien close.